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Le plan Faubourgs peut-il vraiment « tuer » le festival d’Avignon ?

Depuis le début de l’année 2022, la mairie d’Avignon a mis en place le plan Faubourgs, un projet qui vise à réduire l’utilisation de la voiture en aménageant la circulation, le stationnement et les transports en commun. À un mois du festival, certains s’inquiètent d’un impact sur l’événement.

Les embouteillages se multiplient dans les faubourgs d’Avignon (ici en photo) ainsi que sur la rocade. © Hugo Quennehen


Des klaxons, des insultes, des fumées de pots d’échappement : l’avenue Saint-Ruf, qui relie Avignon intra-muros au sud de la ville, cristallise toute la discorde. Ici, les noms d’oiseaux fusent entre les piétons, cyclistes, motards et automobilistes sur deux voies, dont l’une pour le tramway. Mireille, gérante d’un kiosque au coin de la rue, affirme avoir perdu 30 % de chiffre d’affaires à cause de « ce bazar », plus gros que « d’habitude ». Elle s’interroge : « Qu’est-ce que ce sera pendant le festival ? »



À un mois de la 76e édition, commerçants et riverains du quartier s’inquiètent. Depuis la mise en place du plan Faubourgs en janvier 2022 par la maire socialiste Cécile Helle, les embouteillages se concentrent dans le sud de la ville. Une pétition pour aménager le projet de la municipalité, créée en février, récolte plus de 4 500 signatures.

Sur ce projet « à moyen-long terme » comme l’explique la municipalité, qu’en est-il du court terme et de cet été (le festival se tient pendant tout le mois de juillet, NDLR) ? Gérard Huin d’Angelo, président de l’association Contre le plan Faubourgs, ne mâche pas ses mots et pense que « l'impact de ce projet sur le festival » peut nuire à « sa notoriété et celle de la ville », voire « tuer la culture ».


Un recours en justice contre la ville d’Avignon


Ces inquiétudes, Luna, étudiante en théâtre à Paris, les partage. Elle sera présente à Avignon en tant que comédienne et employée au théâtre du Chêne noir et devra faire le déplacement en voiture, indispensable pour transporter le matériel et le déplacer au quotidien dans la ville intra-muros : « Le mot nous a été donné par nos professeurs de nous y prendre à l’avance afin d’éviter d’être pris dans les bouchons. »


Avec ses camarades, elle devra faire des allers-retours jusqu’aux remparts pour, ensuite, accéder au théâtre à pied ou à vélo. Le tout sans perdre de temps au milieu de la circulation d’une ville à cheval entre deux régions et trois départements. « Si on arrive en retard, ce sera terminé pour nous », assure-t-elle en parlant de sa réputation, celle de l’école et du festival.


Dans des faubourgs (les quartiers au sud de la ville, NDLR) qui représentent 30 000 habitants, la mairie veut réduire le passage quotidien de voitures, de 130 000 à 80 000. L’objectif : retrouver une ville apaisée en favorisant les transports en commun, doux et baisser la pollution.


Ces difficultés pour circuler, les habitants les connaissent depuis des années. « Depuis que j’ai emménagé ici, il y a 20 ans, je n’ai connu que ça, confie Gérard Huin d’Angelo. Avec ce plan, ça s’est amplifié. » Pourtant, la mairie note déjà une réduction de trafic dans les faubourgs (moins 40 000 voitures par jour, NDLR) et une amélioration de la qualité de l’air. La mairie a pris exemple sur Paris, où la fermeture des berges de Seine avait provoqué un tollé. Aujourd’hui, cette décision est acceptée par tous, dont les élus, et montre des effets bénéfiques.


« Un labyrinthe »


Valérie Villette, présidente de l'association les Quatre boulevards, y voit « une avancée » notoire pour les festivaliers. Avec la fermeture, habituelle, des remparts bloqués par les forces de l’ordre durant l’événement, « troupes et touristes » pourront « bénéficier des infrastructures de la ville » pour se déplacer au lieu de prendre la voiture, au risque de se retrouver « dans un labyrinthe ».


En plus du tramway, qui doit être développé à partir de 2023 pour rejoindre la zone d’activité du Pontet au Nord de la ville, le vélo prend une place de plus importante au sein de la Cité des papes. Pour preuve, Avignon a obtenu la note de “D” au dernier baromètre des villes cyclables (A étant la meilleure note, G la pire) après un « F » il y a cinq ans.


La Confédération des petites et moyennes entreprises du Vaucluse (CPME84) a tout de même décidé de mener une action en justice contre la ville d’Avignon. Olivier Pieri, le secrétaire général, évoque « des pertes financières » allant « jusqu’à 70 % » chez plusieurs commerçants. Selon lui, les répercussions du plan Faubourgs vont représenter un réel déclin d’attractivité pour l’événement.


« Au niveau de l’intra-muros, si jamais il y a des dégâts, ils seront infimes, estime quant à elle Valérie Villette. À l’extérieur, puisqu’il est possible de se passer de la voiture, les touristes pourront profiter du charme des faubourgs. » Une autre manière, plus verte, de savourer le festival d’Avignon.

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